PRESSE et ÉVÈNEMENTS

Monique Faucher pour Paroles D’Auteur sur les ondes de Radio Présence

Interview du 26 décembre 2020

https://www.radiopresence.com/emissions/culture/litterature/paroles-d-auteur/article/paroles-d-auteur-du-26-dec-69106?fbclid=IwAR10ICsPpg315rBc4qWI4DhgMeiosOimQkWj8XnNUhPcBrTbEZEPhPelPVc

Martine Roffinella dans Sous le pavé, la plume

PORTES OUVERTES en OCCITANIE

https://www.laregion.fr/Anne-Fleury-VACHEYROUT

Carole Darricarrère dans La Cause littéraire

http://www.lacauselitteraire.fr/l-adescendance-anne-fleury-vacheyrout-par-carole-darricarrere

Martine Roffinella dans Sous le pavé, la plume

TOURNÉE BAZART 2000

https://www.ladepeche.fr/article/2000/04/20/274981-anne-fleury-peint-le-temps-qui-passe.html

SÉANCES DE DÉDICACES

https://www.petitbleu.fr/2019/01/21/anne-fleury-vacheyrout-a-dedicace-sa-premiere-autofiction,7964113.php

Gérard Ansaloni, Postface

Poète, auteur, compositeur, orchestrateur et interprète français

De L’Adescendance, roman d’Anne Fleury-Vacheyrout, chez 5 sens Éditions

Toliary, à Madagascar, que l’on dit aussi fin du voyage, Fitoliana.

Voilà, j’ai passé quelques soirées et nuits avec toi, sans que cela se sache, sans bouillotte, je ne suis pas frileux, sans plus rien d’ailleurs, si j’ose dire que le souvenir de l’anxiété quotidienne qui me laisse en paix lorsque le soleil a disparu. Ton Forest a raison, il a vu, mais il faudrait être aveugle ou n’avoir pas appris à lire, il a vu. En même temps si lui ne voyait pas ce serait à désespérer. Pour autant cet homme me laisse dubitatif. Je suis jaloux comme une tique. Entre l’idée et le chevalet il y a une sacrée distance. L’idée sans le chevalet c’est… rien. Un illustre poète du XIXème disait à l’un de ses amis, illustre peintre du même siècle : « J’ai envie de peindre, j’ai des idées ». Ce à quoi notre barbouilleur répondit que l’on ne peignait pas avec des idées mais avec de la peinture. Ou quelque chose comme ça. Souvenirs de vieilles lectures. Bien que je sois jeune ainsi que me le disait dernièrement une amie, mes lectures, pour certaines commencent à dater. En revanche il en est une qui fleure encore l’insolence tant sa fraîcheur mitonne en ma cervelle.

C’est vraiment très bon.

« Si les signes vous faschent, ô quant vous fascheront les choses signifiées ». C’est une chose centrale dans ce roman que cette affaire de signes vus, lus, interprétés, disséqués à travers des phrases minutieuses où les sons et les couleurs nous font le coup baudelairien. Surprenant ce que le son est présent dans ton œuvre, jusqu’au pompeux du Keuchel cité quelque part ; détail. Je continuerai à bien dormir, j’ai toujours bien dormi, peut-être moins depuis quelques années mais globalement plutôt sereinement. L’histoire de cette affaire n’est pas ce qui importe dans ce roman. C’est l’écriture qui est importante. En effet c’est elle qui sent la pâte, la matière, la peinture. Et sous la pâte, la matière, la peinture, bigre ! Il y a de l’idée, j’allais écrire de la vie ; forcément : pour monter il faut descendre. De la fumée sur les cendres. Les meilleurs sont Dali et Picasso.

Je me souviens que le soir de la mort de Dali, la télévision diffusa tard, le soir, le testament vidéo de celui-ci. Dali a dit quelque part qu’il aurait aimé utiliser la vidéo comme matière. Et youp ! L’image s’est arrêtée laissant place à un joli nuage de point blanc sur fond noir, essaim tourbillonnant d’étoiles parasitiques, de ces parasites qui n’existent plus aujourd’hui, tout au plus remplacés par des gels d’images pixelisées. Du coup, ne restait du Dali que l’idée sur les téléviseurs. Bravo l’artiste ! Mais c’était compter sans quelques croûtes disséminées sur la planète, de celles que l’on gratte quand on est gosse, n’est-ce pas ? Breton me fatigue souvent et Éluard me noie. Seul reste Aragon lorsqu’il chante pour passer le temps.

Chevalet, forme, vers, structure. Je tape « oeuvre Fred Forest » sur mon moteur de recherche et je vois des photos de Fred Forest, des dizaines de photos de Fred Forest. Je tape « oeuvre Salvador Dali », je vois des dizaines de tableaux.

Les images sont riches, nouvelles, saisissantes ; « les choses lui reviennent, coupantes et régulières, comme un hachoir sonnant sur le bois du billot »… « Leurs mains nerveuses cousues à l’ourlet des manches font un bruit de coton frotté subtilement au revers de l’attente ». Ben il y a peut-être du Duras mais il y a aussi de sacrés morceaux de lard comme dans les bonnes soupes, des morceaux de Rimbaud et des carcasses de Rembrandt. Il y a de quoi manger là-dedans. Ton bouquin, c’est une auberge généreuse, dans un monastère. Ta cantine c’est le réfectoire du cloître, la table de la celle. On y mange grassement en costume de bure cependant que frère untel, ou amant, mari je ne sais pas lit depuis la chaire le guide du bien aller.

Et puis il y a l’alternance contrôlée de la description de l’ordinaire quotidien, quoique avec toi l’ordinaire possède une drôle d’allure, sous tendue par des barils de signes, description de l’ordinaire quotidien alternant avec la plongée dans les phrases puissantes. C’est du Sade. « Plus loin sous l’église une ombre passe ». Ben voyons. Tout le monde a bien vu que plus loin, sous l’église une ombre passait. C’est très exactement sublime. Juste sublime comme disent les enfants. Tu me manques Fleury.

Les gens qui te diront avoir lu « L’Adescendance » sont des menteurs. Peut-être l’auront-il vu, mais pour l’avoir lu il faut avoir eu dix vies. Arrête-toi, là, au point. Reviens en arrière. La transmission s’opère quand le livre retourne sur la table. Relis. Oui, elle a bien écrit « La transmission s’opère quand le livre retourne sur la table ». C’est qui ? Fleury. Connais pas. Normal.

Du coup je vais chercher Fleury. annefleury.fr. Toc. Voilà ce que je vois : le vingtième de mes « Besoin de toi ». Ça me saute au visage.

(Extrait de : « Le besoin de toi », 2018, inédit)

Plusieurs choses

Plusieurs visions

Tout d’abord

Je crois

Chez mon ami Michel Calmon

Parmi les tableaux de sa collection nuagiste

Une petite croûte

Un cinquante sur trente

À la louche

De Philippe Gérard

Allias Frédéric Benrath

De mémoire

Un fond « nuageux » dans les tons fauves

Marron

Jaune

Ocre

Terre de Sienne

Un souvenir de brouillon

Une sorte de brouillard de devenir

Une image confuse que je garde à l’esprit

Des arrières plans de Léonard et des peintres de la Renaissance de façon plus générale

Brouillard

Brouillard de Breughel sur les champs enneigés

Peut-être

Devant

Une écriture belle

Sauvage

Inclinée

Foncée

Vive

Ferme et alerte

Des coups de griffes

Une écriture sauvage

Indomptée

Des formes de mots

De phrases mais sans aucune forme suffisamment donnée aux lettres pour qu’elles expriment un quoi que ce soit de sens

La confusion

Le souvenir encore mêlé des nervures des ombilics qui les relient aux limbes

Souvenir d’Artaud peut-être

Et qui présagent d’un futur aussi certain que l’est la prédiction

Tu verras

Plus loin

Chez Jean Vircoulon

Le héron halluciné emportant avec son vieillissement

Le vieillissement de Sainte-Foy-la-Grande

Chez Jean

Du temps du « Café Orange1 »

Une toilée dans son salon

Un bon mètre cinquante sur un

Toujours le même fond de couleurs mêlées mais là dans les sombres obscurs

Des marrons profonds

Des vagues de Benrath

Des nuages sous marins remontants à la surface d’une mer de couleurs bouillonnantes

Des enroulements de Béhémoths tordus dans le déchaînement des éléments acryliques

Dans cet océan furieux de pigments enlacés dont les chemins sans cesse interrompus

Croisés

Battus par d’autres courses plus violentes

Une barque infime au premier plan

En bas

À gauche

Une barque portant deux spectateurs impavides sur cette toile insensée

C’était le Dante de Suret-Canale

Une dernière chose

Mais plus tôt

Dans l’atelier que mon gentil papa avait bâti au fond de la cour ensoleillée

Pour que dans sa retraite il puisse continuer de travailler le bois

Son bois dans l’élégance pâle des copeaux sensuels

C’est affaire de gens de métiers

Qui n’a tenu entre ses mains rabot

Varlope ou guillaume ne connaît rien à la sensualité de ces choses

Dans cet atelier sommaire

Un bel établi

Une trentaine d’outils et tout un bric-à-brac de sornettes de tous poils

Un piano désossé

Des ferrures

La scie d’un scieur de long

Des matériels de camping

Pots de peinture

Étagères vides ou pleines

Chevrons

Lattes

Serre-joints

Presses

Meule

Dans ce fatras amoureux duquel s’ouvrait une fenêtre sous une treille donnant sur la cour étonnante de jeunesse

Dans cette caverne lumineuse où je passais bien des heures se trouvait un appareil de pinceaux et de couleurs de bâtiments

Et une plaque de verre

Cinquante sur cinquante

J’ai plongé la brosse dans la peinture et j’ai étalé tout ça sur le verre

Et puis encore avec une autre couleur et puis encore et encore jusqu’à ce que toute la surface en soit couverte

Le résultat était assez laid

Dépité

J’allais courir vers d’autres sujets de création et posais l’œuvre face contre le pied de l’établi

Sauf que

Derrière l’œuvre

Derrière le verre

Ce qui parut était superbe

Le mélange des couleurs apparut d’une extrême finesse

Des lassis blancs et bleus enchevêtrés finement

Des blancs et bleus enlacés comme seul l’envers du décor pouvait les enlacer

Un foisonnement d’entrelacs et de nuances subtils que n’eut pu produire l’art

Qui sait ce qui se cache au dos des toiles

Personne ne le saura jamais sauf si l’on remplace la toile par le verre

Je me promis d’y revenir et j’y revins quarante ans plus tard en additionnant les ceci et les cela

LE JARDIN

Il est parti, évaporé,

Le beau jardin de mon retable

Mais j’ai gardé les couleurs stables

De ses pigments dans le mortier.

Moi le voleur, le grand banquier,

Peintre, c’est moi ! Peintre et comptable !

Il est parti, évaporé,

Le beau jardin de mon retable.

Avec ses fleurs par cent broyées,

Terre en poussière inimitable,

Moi, le rapin, le cas pendable

Je l’ai fixé qui a passé.

Il est parti, évaporé.

Je me rapproche de toi Fleury, je me rapproche de toi.

Je suis fatigué. Il me reste Ovide. Pessoa, Fleury, Ovide. Qui c’est cette Fleury ? Je ne sais pas. Et tu lui écris comme ça ?

Ben oui, je ne la connais pas ; aucun danger ; et puis je garde tout dans un coffre ; j’écris pour les autres. Je ne la connais pas mais je la sais bien, comme moi. Mêmes pères, mêmes mères depuis notre dernier ancêtre commun, je la sais comme je me sais, comme tous les autres, depuis LUCA, depuis notre last universal common ancestor. Qui a arrêté quoi ? Le temps ?

Au bal des ardents, je suis celui qui a pris feu. Tu me manques Fleury.

1Groupe de peintres auquel je m’associai dans les années 80.